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.Enfin, le Dr Curtis poussa un profond soupir.– Eh bien, c’est entendu, Valency.Je ne crois pas un mot de tout cela.Tout du moins, je n’y croirais pas si j’étais dans mon état normal mais vous utilisez une terminologie correcte comme si vous connaissiez vraiment… quelque chose.Alors soit ! je ferai ce que vous attendez de moi.C’est cela ou la mort pour l’enfant.Dieu ait pitié de nos âmes !L’idée de rester calfeutrée entre quatre murs en tête à tête avec mes craintes et mes sombres pensées m’était intolérable.Aussi, je repris le chemin de l’école, frileusement emmitouflée dans mon manteau trop mince pour me protéger du froid mordant qui était brutalement tombé avec la nuit, en priant en silence.Mais je ne pus me résoudre à entrer.Le miroitement aveuglé des vitres me fit rebrousser chemin en frissonnant.Je marchais dans une brume tissée d’inquiétude où rien n’existait plus, ni le sens du temps ni celui de l’orientation.Ce ne fut ni les lumières ni aucun repère familier mais une glaciale lassitude qui me ramena chez Abie.Mes mains engourdies eurent du mal à faire jouer la poignée de la porte.J’entrai en trébuchant dans la cuisine et me pelotonnai dans un fauteuil.Penchée au-dessus du poêle brûlant qui rougeoyait dans l’ombre intime de la vaste pièce, j’essayai de rétablir la circulation dans mes doigts gourds.Peu à peu, une douce chaleur m’envahit et je m’assoupis.Soudain, la porte de la chambre s’ouvrit et se referma en claquant.Le Dr Curtis, sans lâcher le bouton, s’adossa au battant et s’exclama, plus pour lui-même qu’à mon intention :– Savez-vous ce qu’ils ont fait ? Ce qu’ils m’ont fait faire ? Oh ! Seigneur ! (Il s’approcha du poêle d’un pas mal assuré, me marcha sur les pieds et s’effondra à côté de moi, la tête dans les mains).Ils m’ont fait faire de la neurologie ! Ils m’ont fait opérer son cerveau ! Réparer les connections et les rétablir ! Ce n’est pas possible ! Cela n’existe pas ! Les cellules cérébrales endommagées ne se réparent pas.Personne ne peut reconstituer des circuits détruits ! Ce n’est pas possible.Et c’est pourtant ce que j’ai fait ! Je l’ai fait !Je m’agenouillai devant lui et le serrai dans mes bras pour tenter de le réconforter.– Allons, allons… calmez-vous, murmurai-je d’une voix apaisante.Il s’accrochait à moi comme un enfant terrifié :– Sans anesthésie ! Elle le maintenait endormi.Et il n’y a pas eu d’écoulement sanguin quand j’ai entaillé le cuir chevelu ! Ils l’ont empêché de saigner.Et les choses invraisemblables que j’ai faites avec les quelques instruments que j’avais apportés ! Et je voyais le cerveau se réparer sous mes yeux ! Insensé !– Mais tout s’est bien passé.Abie va guérir, n’est-ce pas ?– Que voulez-vous que j’en sache ? vociféra-t-il en se dégageant.Je suis complètement dépassé.Je lui ai raccommodé le cerveau et il respire toujours mais que voulez-vous que je vous dise de plus ?– Remettez-vous.C’est fini, maintenant.– Ce ne sera jamais fini.(Il fit un effort sur lui-même pour recouvrer son calme et, l’un aidant l’autre, nous nous relevâmes).Ce souvenir ne me quittera qu’avec la mort.– Nous pouvons vous faire oublier.(C’était Valency qui avait parlé.Elle était sur le seuil de la porte).Si vous le souhaitez, nous pouvons vous ramener à votre ranch sans que vous ayez d’autre souvenir de cette nuit que celui d’une agréable visite à Bendo.– Vous pouvez faire ça ? (Il la dévisagea pensivement).Vous le pouvez, ajouta-t-il – et ce n’était plus une question mais l’énoncé d’un fait.– Désirez-vous oublier ?– Bien sûr que non, répliqua-t-il avec hargne.Excusez-moi.C’est que, voyez-vous, il m’arrive assez rarement d’accomplir des miracles dans le désert.Mais si j’en ai accompli un une fois, peut-être que…Valency sourit.– Alors, vous comprenez ce que vous avez fait ?– Euh… non mais si je pouvais… si vous vouliez… Il doit sûrement exister un moyen…– Oui, mais il faut qu’un Sensitif travaille avec vous et Bethie possède tous les attributs qui font les Sensitifs.– Ce que j’ai vu est donc vrai ? Ce que vous m’avez dit de… du Foyer, c’est vrai ? Vous êtes des Extraterrestres ?– Oui, soupira Valency.Tout au moins, nos grands-parents étaient des Extraterrestres.(Elle retrouva son sourire).Mais nous sommes en train d’apprendre comment nous pouvons nous intégrer à la Terre.Peut-être qu’un jour nous serons capables… (Elle changea abruptement de sujet).Vous comprenez certainement, docteur Curtis, que nous souhaitons que vous ne parliez à personne ni de Bendo ni de nous autres.Nous préférons passer pour des gens ordinaires aux yeux des Extérieurs.Le médecin éclata d’un rire bref.– Me croirait-on si j’en parlais ?– Peut-être pas.Mais peut-être suffisamment, quand même, pour éveiller la curiosité et ce serait déjà trop.La situation est mauvaise, ici, et il faudra beaucoup de temps pour effacer…Sa voix mourut et je compris qu’elle était passée sur télépathie pour mettre Curtis au fait du problème local.Quelle est la durée de la pensée ? Combien cela prend-il de temps pour penser l’enfer… et le paradis ?– Oui, murmura le médecin.Il faudra longtemps.– Si vous voulez, je peux vous créer un blocage pour vous empêcher de parler.– Rien à faire, riposta-t-il sèchement.Je suis assez grand pour pratiquer l’autocensure, je vous remercie.Valency rougit.– Excusez-moi.Mon intention n’était pas d’être arrogante.– Mais non, ce n’est pas cela.Simplement, cette soirée m’a mis les nerfs à rude épreuve.Quelle journée !– Comme vous dites !Je lui souris et m’essuyai la joue avec stupéfaction j’étais en larmes ! J’émis un rire embarrassé.Un rire que je ne pouvais pas contrôler et qui se transforma soudain en sanglots.Je m’en voulais amèrement de pleurnicher comme une enfant.J’étreignis les mains solides de Valency et sombrai d’un seul coup dans une nuit tiède et douce où il n’y avait plus rien, ni pensée, ni crainte, ni nécessité de croire à quoi que ce soit qui scandalise la raison.Rien que le sommeil.Ce fut une année enchantée qui s’envola avec une rapidité sans nom.Les jours fériés se succédaient comme les poteaux téléphoniques qui défilent de l’autre côté de la fenêtre du train [ Pobierz całość w formacie PDF ]